Sanctions en cas de non-respect des règles de majorité en Assemblée Générale

Les risques du non-respect des règles de majorité en Assemblée Générale sont nombreux et encombrants. Lorsque votre client se retrouve dans une situation d’abus de majorité en Assemblée Générale, c’est partie intégrante de vos fonctions en tant que professionnels du droit, de l’assister, pour lui assurer une plus large protection de ses droits, en fonction de sa situation d’espèce. Mais c’est aussi partie intégrante de vos fonctions, d’effectuer un rappel à l’ordre, à votre client, concernant les règles de majorité applicables en Assemblée Générale. Retour textuel et jurisprudentiel sur ces règles, et les sanctions corrélatives qui suivent leur non-respect.

Le dépôt des comptes annuels et les modifications statutaires constituent des sujets phares dans toute vie sociétale, traités par décision des Assemblées Générales. Les Assemblées Générales Ordinaires annuelles sont celles qui traitent notamment de l’approbation des comptes de la société. L’Assemblée Générale Extraordinaire quant à elle, sera celle qui traite plus particulièrement du cas de modification des statuts de la société. Cette dernière étant d’occurrence plus rare, ses conditions de majorité seront moins restrictives.

Pour pouvoir adopter leurs délibérations par procès-verbaux, les Assemblées Générales Ordinaires ou Extraordinaires doivent ainsi respecter certaines règles de majorité et de quorum. Le quorum désigne le minimum du capital social nécessaire pour pouvoir procéder au vote. Il faut distinguer ce dernier de la majorité qui n’est autre qu’un seuil qu’il faut atteindre pour voter une délibération de l’Assemblée Générale. Ce seuil est souvent délimité par les associés présents, le nombre de titres, le capital social, etc. Si ce seuil n’est pas obtenu, la décision en question sera refusée

Quelles sont les différentes règles de majorité applicables lors d’une Assemblée Générale ? Comment assurer leur respect et éviter les abus conséquents ? Bienfait post-lecture, ces règles de majorité, qui diffèrent en fonction de la nature de l’entreprise et de l’Assemblée en question, n’auront plus aucun mystère pour vous. 

Les règles de majorité en Assemblée Générale pour une SARL (articles L. 223-29 et L. 223-30 du Code de commerce)

  1. Pour une AGO: Pour la première convocation, pour les délibérations en AGO, il faut réunir une majorité des parts sociales qui composent le capital social. Pour la seconde convocation, la majorité des votes émis suffit.
  2. Pour une AGE: en fonction de la date de constitution de la SARL les règles applicables varient.  En effet pour les SARL qui sont constituées après le 4 août 2005, pour une première convocation, la majorité des deux tiers des parts sociales des associés représentés ou présents suffit pour adopter la décision. Pour une seconde convocation on est dans le même cas de figure : les deux tiers des parts sociales des associés représentés ou présents est nécessaire. Les statuts de la SARL peuvent bien évidemment prévoir une majorité plus grande sans pour autant réclamer l’unanimité. Cependant, pour transférer le siège social d’une SARL, il faudra réunir au moins la moitié des parts sociales qui composent le capital social. En parallèle pour les sociétés constituées antérieurement au 4 août 2005, une majorité des ¾ minimum des parts sociales qui composent le capital social est requise. Aucune majorité plus importante ne pourra être prévue par les statuts. Cependant pour transférer le siège social ou opérer une augmentation de capital social en incorporant les réserves, il faudra réunir la moitié des parts sociales qui composent le capital social.
  3. Les décisions qui nécessitent une unanimité : l’augmentation de l’engagement des associés de la société à travers un passage à un capital variable, une transformation en SNC, ou une augmentation de la valeur nominale des parts nécessite obligatoirement une unanimité. De plus, la modification de la nationalité de la société nécessite l’unanimité.

Les règles de majorité en Assemblée Générale pour une SAS (article L. 227-9 du Code de commerce)

  1. Pour une AGO: Il faut en revenir aux statuts de la SAS pour voir quelles règles de majorité sont applicables.
  2. Pour une AGE: de même, il faut en revenir aux statuts de la SAS pour voir quelles règles de majorité s’appliquent.
  3. Les décisions qui nécessitent une unanimité : l’augmentation de l’engagement des associés de la société à travers un passage à un capital variable, une transformation en SNC, un ajout de clause d’agrément, ou une augmentation de la valeur nominale des actions, nécessite obligatoirement une unanimité. De plus, le vote portant sur l’inaliénabilité temporaire des actions nécessite l’unanimité.

 

Ces mêmes règles de majorité sont applicables pour une SNC ou société en nom collectif. Elles sont également applicables pour une SCI ou Société civile immobilière.

Les règles de majorité en Assemblée Générale pour une SA (articles L. 225-96 et L. 225-98 du Code de commerce)

  1. Pour une AGO: Pour la première convocation, il faut une majorité des voix des actionnaires présents. Pour la seconde convocation, il faut une majorité des voix des actionnaires présents.
  2. Pour une AGE: Pour la première convocation, il faut ⅔ des voix des actionnaires présents. Pour la seconde convocation, il faut une aussi ⅔ des voix des actionnaires présents.
  3. Les décisions qui nécessitent une unanimité : l’augmentation de l’engagement des associés de la société à travers une transformation en SNC ou une augmentation de la valeur nominale des actions, nécessite obligatoirement une unanimité. De plus, cette unanimité est requise en cas de modification de la nationalité de la société, dans le cas où le pays d’accueil en question n’a pas signé de convention spéciale visant l’obtention de sa nationalité, le maintien de sa personnalité juridique, ainsi que le transfert de son siège social.

 

Pour étudier la totalité des règles de majorité applicables au sein de votre société, n’hésitez pas à vous faire accompagner par l’un de nos formalistes LegalVision en droit des Affaires. Cependant ces règles textuelles de majorités ne sont pas exhaustives. En effet, le risque d’abus reste omniprésent.

Les conditions d’un abus de majorité en Assemblée Générale

L’abus de majorité, un abus du droit de vote lors d’une Assemblée Générale, peut être identifié quand d’une part, la décision adoptée s’oppose avec l’intérêt social de la société tel qu’apprécié par les juges, et que d’une autre, elle serve un intérêt purement personnel des associés ou actionnaires majoritaires, au détriment des associés ou actionnaires minoritaires. Fixer une rémunération excessive des gérants au vu des finances de la société (Cass. com. 15/01/2020), de tel sorte que ses résultats s’en trouvent touchés, constituerait un exemple d’abus de majorité. Il en va de même pour un changement de forme sociale au vu d’éviter un pacte social protégeant un associé minoritaire (Cass. com. 08/02/2011). Ainsi va-t-il pour une autorisation de cautionnement de prêts consenti à un associé majoritaire.

Dans ce cas, un délai de 3 ans après la prise de la décision abusive court, où il est possible d’exercer une action en abus de majorité. Cette action en justice aura pour débouché l’annulation de la décision prise. Si cette décision bloque la société dans son fonctionnement, le juge pourra décider de sa dissolution. Une action en responsabilité,  pour se faire dédommager par les associés majoritaires, cette fois-ci dans un délai de 5 ans, est aussi envisageable.

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Rédigé par Kévin Chedid

Après plusieurs expériences dans des cabinets d'avocats reconnus, Kévin est aujourd'hui inscrit en Master 2 de Droit Privé Comparé à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Passionné de poésie, Kévin a remporté le premier prix AMOPA pour la catégorie jeune poète étranger décerné par le Ministère de l'éducation nationale. Aujourd'hui, il met sa plume à contribution des lecteurs de LegalVision sur des sujets de fond en ce qui concerne le droit et l'univers juridique.