L’exercice en société des professions libérales réglementées

Force est de constater qu’au fil des années, les dispositions actuelles de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relatives à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales sont devenues de moins en moins intelligibles, notamment en raison de réformes successives qui ont impacté directement les professionnels du droit.  

Pour y remédier, l’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 a été instaurée dans l’objectif de simplifier et de sécuriser le cadre juridique régissant l’exercice des professions libérales réglementées en société. Elle entrera en vigueur le 1er septembre 2024. 

Table des matières

Qu’est-ce qu’une profession libérale réglementée ? 

Une profession libérale se réfère à une activité professionnelle pratiquée de manière indépendante par une personne dans l’intérêt d’un client ou d’un public, sans être soumise à la supervision d’une hiérarchie.  

On dit d’elle qu’elle est réglementée lorsqu’elle est soumise à un encadrement par des ordres professionnels ou des organismes similaires, dont la mission est de protéger le public en veillant au respect de règles déontologiques. 

Pour pouvoir exercer une profession libérale réglementée, il est nécessaire de remplir certaines formalités propres à l’activité envisagée. Cela peut inclure la demande d’une autorisation spéciale, l’obtention d’un agrément ou encore la délivrance d’une carte professionnelle. 

De plus, pour de nombreuses professions libérales réglementées, l’inscription à un ordre professionnel est obligatoire pour pouvoir exercer. On compte parmi elles :  

  • Les avocats, 
  • Les notaires, 
  • Les experts-comptables, 
  • Les chirurgiens-dentistes, 
  • Les architectes, 
  • Et bien plus encore. 

Quels sont les points clés de l’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 ?  

Rappel sur l’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023  

Prise en application de l’article 7 de la loi n° 2022-172 du 14 février 2022, l’ordonnance n°2023-77 du 8 février 2023 a pour but de clarifier, simplifier et harmoniser les normes applicables aux professions libérales réglementées. Ces dernières sont généralement soumises à un statut législatif ou réglementaire, ou sont protégées par un titre.  

Cette ordonnance a également pour objectif de faciliter le développement et le financement de ces structures d’exercice réglementées, sans pour autant ouvrir davantage ces professions à des tiers extérieurs. 

Intégration des sociétés d’exercice libéral, des sociétés civiles de moyen, des sociétés coopératives et des SEPPL au sein d’une ordonnance commune  

Dans un souci de cohérence, l’ordonnance n° 2023-77 en date du 8 février 2023 suggère que les sociétés d’exercice libéral, les sociétés de moyen, les sociétés coopératives et les SEPPL soient incluses dans une même ordonnance relative aux professions libérales réglementées. 

Quant aux associés personnes morales, ils pourront également faire partie d’une société en participation pour offrir plus de flexibilité aux professionnels.  

En résumé, ces quatre types de sociétés régies par les lois n° 90-1258 et n° 66-879 devraient être traités ensemble dans le livre II de l’ordonnance du 8 février 2023. 

Vers une délimitation plus structurée des familles de professions libérales 

L’ordonnance mentionne trois groupes distincts de professions libérales réglementées :  

  • Les professions libérales de santé,  
  • Les professions libérales juridiques et judiciaires,  
  • Les autres professions non-nommées. 
 

Les 28 alinéas des articles 5 et 6 sont, quant à eux, répartis en dispositions communes assorties par trois séries de dispositions spécifiques correspondant aux trois groupes de professions. 

En somme, bien que cela implique l’augmentation du nombre d’articles, cet ajustement améliore considérablement la clarté et la compréhensibilité des dispositions. 

Élargissement des options de la société pluriprofessionnelle d’exercice 

Le livre IV de l’ordonnance du 8 février 2023 se concentre sur la société pluriprofessionnelle d’exercice (SPE), un type de société qui permet d’exercer plusieurs professions libérales réglementées au sein d’une même structure. Selon ce livre, afin de rendre le texte plus facile à manier par les professionnels et plus clair, il est préférable d’éviter les renvois en son sein, et de les développer dans la partie dédiée à la SPE. 

Cette approche permet de simplifier la lecture des dispositions liées à la SPE en combinant toutes les règles relatives à la SPE dans un seul livre. 

L’éventail des professions concernées par la SPE est également élargi, avec l’ajout des géomètres-experts. 

De plus, le cadre des sociétés pluriprofessionnelles d’exercice autorise désormais explicitement la mutualisation des moyens matériels (y compris immobiliers) entre les associés pour assurer le fonctionnement de leur activité.  

Bon à savoir : Le géomètre-expert désigne une personne exerçant un métier qui consiste à établir différentes mesures liées aux propriétés foncières. 

De nouvelles perspectives pour les sociétés de participations financières  

Le livre V de l’ordonnance du 8 février 2023 reprend le titre IV de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 traitant des sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL). Ces dernières sont des sociétés holding qui ont pour objet la détention et la gestion de participations dans des sociétés exerçant une activité libérale. 

Ce livre V applique les éléments suivants : 

  • Il améliore le dispositif de holdings libérales SPFPL pour encourager le développement économique des entreprises libérales, 
  • Il permet aux géomètres-experts de tirer parti de la pluriprofessionnalité des SPFPL 
  • Il introduit une nouvelle disposition pour éviter aux professionnels des dissolutions lors de la transmission d’une SEL unique détenue par une SPFPL, 
  • Il étend le champ d’application des SPFPL afin de couvrir tous les régimes d’exercice supérieurs à la loi de 1990, 
  • Il permet aux professions juridiques et judiciaires, si une ouverture par décret est réalisée, d’intégrer sous une SPFPL, une société commerciale exerçant spécifiquement des activités accessoires autorisées à la profession concernée. 

Conclusion 

L’un des objectifs clés de l’ordonnance n°2023-77 du 8 février 2023 est de clarifier le cadre juridique des professions libérales réglementées, dont l’inintelligibilité était déjà pointée du doigt en 2021 dans le rapport de la mission de l’Inspection Générale des Finances de MM. Frédéric Lavenir et Nicolas Scotté, visant à simplifier l’exercice libéral. 

Grâce à la diversification des régimes d’exercice en société existants ou encore à l’amélioration du dispositif des holdings libérales, nous réalisons un pas de plus vers la clarification du cadre juridique régissant l’exercice en société des professions libérales réglementées ! 

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Rédigé par Cyrine DRIJE

Titulaire d’un Master en Droit International & Européen des Affaires, Cyrine prépare actuellement un Master II en Droit des Affaires – Juriste d’Entreprise. Elle a choisi de combiner sa passion pour l'écriture avec sa formation juridique, en occupant un poste de Rédactrice en droit des affaires en alternance au sein de LegalVision.