État des lieux du droit à la déconnexion

D’après certains sondages, hommes comme femmes estiment que leur travail s’immisce de plus en plus dans leur vie personnelle. C’est notamment le cas pendant leurs vacances, qui deviennent studieuses, conséquence de la digitalisation et de la généralisation du télétravail. Heureusement, il existe une sécurité : le droit à la déconnexion !

Le droit à la déconnexion a fait son apparition avec la loi El Khomri du 8 juin 2016 complétée de l’ordonnance Macron du 22 septembre 2017, il s’agissait alors d’une première mondiale.

La loi ne donne pas une définition précise du droit à la déconnexion, préférant laisser la main aux entreprises pour organiser son effectivité. Plus concrètement, le droit à la déconnexion consiste pour les salariés à ne pas être joignables en dehors des heures de travail en ne répondant pas aux mails, messages ou appels téléphoniques. L’objectif de ce droit est bel et bien de garantir l’effectivité du droit au repos des salariés et de lutter contre la surconnexion, véritable fléau dans de nombreux domaines d’activité, notamment l’univers juridique.  

Le droit à la déconnexion avait été préalablement consacré par la jurisprudence, notamment dans un arrêt du 17 février 2014 dans lequel la Cour de Cassation avait indiqué que le fait de n’avoir pu être joint en dehors de ses horaires de travail sur son portable personnel est dépourvu de caractère fautif et ne permet donc pas de justifier un licenciement disciplinaire pour faute grave. Cette position s’est confirmée au gré des arrêts qui ont suivi, lesquels ont même parfois conduit à une indemnisation des salariés mis en cause.

Depuis le 1er janvier 2017 la loi impose une négociation annuelle obligatoire (NAO) dans les entreprises de 50 salariés ou plus, laquelle doit porter sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail. Plus concrètement, la négociation doit porter sur les modalités d’exercice du droit à la déconnexion des salariés et la mise en place par l’entreprise de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques en vue d’assurer le respect des temps de repos et de congé, ainsi que la vie personnelle et familiale. L’absence de NAO constitue un délit d’entrave.

À défaut d’accord à l’issue de cette négociation, il incombera à l’employeur d’élaborer une charte après avis des représentants du personnel.

Certaines conventions collectives comme SYNTEC l’ont déjà consacré. Certains grands groupes comme Orange, Michelin ou encore Volkswagen ont déjà pris des mesures pour assurer son effectivité.

Attention : l’absence de politique de prévention dans le domaine peut être très préjudiciable pour l’entreprise, notamment en cas d’action en justice motivée par le burn-out caractérisé d’un salarié.

Le droit à la déconnexion français, même s’il demeure imparfait et imprécis en raison de l’absence de définition légale, aura eu le mérite d’inspirer des pays voisins comme le Portugal, l’Espagne ou encore l’Italie, qui ont décidé de le transposer dans leur droit commun. Même le très réputé Financial Times a loué le droit à la déconnexion français.

Le Parlement Européen a adopté le 21 janvier 2021 un rapport d’initiative parlementaire dans lequel il exhorte la Commission européenne à légiférer sur le droit à la déconnexion. Ce but étant également porté par un certain nombre d’associations.

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Rédigé par Quentin Vanson

Titulaire d'une Licence et d'un Master de Droit à l'Université de Bourgogne, Quentin a exercé des fonctions de juristes formalistes au sein de structures publiques et privées, ce qui lui confère une expérience pluri-disciplinaire. À l'affût des dernières nouvelles du monde juridique, il exerce aujourd'hui des fonctions de Responsable Métier - Juriste Formaliste au sein de LegalVision