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Comment déterminer les bénéficiaires effectifs d’une entreprise ?

Instaurée pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, la déclaration des bénéficiaires effectifs revêt une importance capitale. Mais comment identifier les bénéficiaires effectifs d’une entreprise ? Quelles sont les implications de cette déclaration ? Cet article vous livre tout ce que vous devez savoir sur le sujet pour une gestion d’entreprise sans faille.

Table des matières

La déclaration des bénéficiaires effectifs en France

La création d’une société implique une démarche obligatoire : la déclaration au registre des bénéficiaires effectifs (RBE). En France, ce registre est géré par les greffiers des tribunaux de commerce.

Cette obligation, issue d’une réglementation européenne et transposée dans le code monétaire et financier au travers les articles L. 561-2-2, L. 561-46 à L. 561-50 du code monétaire et financier  permet de lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Les catégories d’entités concernées par cette déclaration sont les suivantes :

  • les sociétés et groupements d’intérêt économique domiciliés en France ;
  • les sociétés commerciales établies à l’étranger mais ayant un établissement en France ;
  • les entités soumises à l’obligation d’immatriculation au RCS et au RNE, telles que les organismes de placement collectif, les associations, les fonds de dotation…

 

Pour respecter les normes européennes, le Parlement a voté une nouvelle loi qui a élargi l’obligation de déclaration des bénéficiaires effectifs à toutes les organisations philanthropiques. Cette exigence s’applique aux associations, indépendamment de leur immatriculation au RCS.

Comment identifier facilement les bénéficiaires effectifs ?

Petit rappel

Un bénéficiaire effectif est une personne physique qui détient ou exerce, de manière directe ou indirecte, le contrôle sur une entité juridique. Elle répond à l’une des conditions suivantes :

  • elle possède, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits de vote et/ du capital de la société ;
  • elle exerce un contrôle sur l’entreprise par d’autres moyens.

En l’absence de satisfaction de ces critères, le bénéficiaire effectif est la ou les personnes autorisée(s) à représenter la société (gérant, président…).

Quelques cas de figures possibles

Voici quelques cas de figure dans lesquels les personnes sont considérées comme bénéficiaires effectifs.

1.    Le contrôle par d’autres moyens : la chaîne de détention majoritaire  

Dans une entreprise, des entités juridiques peuvent détenir en cascade des actions majoritaires. Au sommet se trouve une personne physique considérée comme le bénéficiaire effectif par « tout autre moyen de contrôle », même si elle ne possède pas directement 25 % du capital de l’entreprise. Elle détient des actions majoritaires dans une personne morale, laquelle est elle-même actionnaire majoritaire dans l’entreprise en question.

Un exemple

 

Monsieur François est bénéficiaire effectif de la société Soleil. Bien qu’il ne possède que 13,26 % du capital de cette société de manière indirecte (51 x 51 % x 51 % = 13,26 %), il détient la majorité des actions dans la société Dune.

Cette dernière contrôle la société Nova, qui à son tour détient la majorité des actions de la société Soleil.

Ainsi, Monsieur François a finalement un contrôle sur l’assemblée générale des associés ou actionnaires, ce qui fait de lui le bénéficiaire effectif. 

2.    Le groupe familial

Les membres d’un groupe familial majoritaire sont des bénéficiaires effectifs, si l’ensemble équivaut à au moins 25 % du capital social, même si aucun d’entre eux ne détient individuellement plus de 25 % du capital.

Un exemple 

 

Madame Marie et Monsieur François, ainsi que leurs deux enfants, Jean et Camille, sont considérés comme bénéficiaires effectifs de la Société Soleil en tant que membres d’un « groupe familial ».

Pourquoi cela ?

Bien qu’aucun membre de la famille ne possède individuellement plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société Soleil, cela n’empêche pas ces quatre personnes d’être qualifiées de bénéficiaires effectifs en vertu des « autres moyens de contrôle » exercés au sein de ce groupe familial, même sans un accord explicite entre eux. 

3.    La détention de parts sociales ou d’actions par un mineur

Un mineur ne peut pas exercer les droits de vote associés à ses parts ou actions. Ses représentants légaux doivent être déclarés bénéficiaires effectifs et exercer ses droits jusqu’à sa majorité.

Un exemple


Mademoiselle Marie est bénéficiaire effectif de la Société Soleil, tout comme ses parents, Monsieur François et Madame Camille.

Pourquoi ?

Bien que Mademoiselle Marie possède 40 % du capital de la société, elle est mineure et ne peut donc pas exercer les droits de vote associés à ses actions. Ce sont ses parents, Monsieur François et Madame Camille, en tant que représentants légaux, qui détiennent les droits de vote en raison de la minorité de Marie.

Ils exercent donc également le rôle de bénéficiaires effectifs. 

4. Le démembrement de propriété : la nue-propriété et l’usufruit

Lorsque des parts représentant plus de 25 % du capital ou des droits de vote sont démembrées entre un usufruitier et un nu-propriétaire, le nu-propriétaire, en tant que détenteur du capital, doit être déclaré comme bénéficiaire effectif.
L’usufruitier doit également être considéré comme bénéficiaire effectif puisqu’il détient des droits de vote, au minimum pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices (Code civil article 1844).

Un exemple

Madame Marie, Monsieur François, et Monsieur Jean sont considérés comme bénéficiaires effectifs de la société Soleil, une SARL, selon les dispositions statutaires.

Pourquoi ?

Madame Marie possède directement 55 % du capital de la Société Soleil, faisant d’elle une bénéficiaire effective.

Monsieur François détient 45 % du capital de la société Soleil en tant que nu-propriétaire, ce qui le qualifie également comme bénéficiaire effectif.

Monsieur Jean, quant à lui, possède 45 % de l’usufruit.

En général, les statuts accordent aux usufruitiers des droits de vote, même s’ils sont limités à des décisions comme l’approbation des comptes et l’affectation des bénéfices. Cela ferait de Monsieur Jean un bénéficiaire effectif, sauf si les statuts précisent qu’il est exclu de ces droits de vote, qui seraient alors attribués à Monsieur François. 

5. Le démembrement de propriété et l’indivision

Dans certains cas, un bien peut être à la fois en indivision et soumis à un démembrement de propriété.

Par exemple :

Monsieur et Madame Paul sont les bénéficiaires effectifs de la SCI Soleil, tout comme, d’après les statuts, Madame Camille, Madame Marie, Monsieur François et Madame Laura.

Pourquoi ?

Le démembrement de propriété entre les époux Paul et leurs trois enfants concerne plus de 25 % des parts de la SCI Soleil. En général, les statuts attribuent les droits de vote aux usufruitiers, même si ces droits sont limités à certaines décisions comme l’approbation des comptes et l’affectation des bénéfices.

Dans ce contexte, Madame Camille, Madame Marie et Monsieur François, en tant qu’usufruitiers indivisaires, doivent également être considérés comme bénéficiaires effectifs, en plus de Monsieur et Madame Paul, qui détiennent la nue-propriété indivise du capital.

Quant à Madame Laura, elle est bénéficiaire effective puisqu’elle possède 60 % du capital et des droits de vote de la Société Soleil. 

6. La copropriété de parts sociales indivises

Qu’en est-il en cas de présence de copropriétaires de parts sociales ? Le raisonnement est le même. Un point important : il faut prendre en compte le ou les mandats donnés pour représenter les copropriétaires et analyser les droits de vote.

Un exemple

Madame Marie et Monsieur François détiennent ensemble 55 % du capital de la Société Soleil en indivision, ce qui les qualifie chacun comme bénéficiaires effectifs.

Madame Camille est la représentante de cette indivision. Si son rôle inclut l’administration générale des parts ou actions indivises, de manière continue, elle devra être déclarée comme bénéficiaire effective, car ce mandat lui confère un pouvoir de contrôle sur l’assemblée générale des associés ou actionnaires.

En revanche, si son mandat se limite à représenter les autres indivisaires lors de l’assemblée, ou s’il s’agit d’une tâche ponctuelle, elle n’aura pas à être déclarée en tant que bénéficiaire effective.

Madame Laura, quant à elle, est clairement bénéficiaire effective puisqu’elle possède 40 % du capital de la Société Soleil. 

7. Du ou des représentants légaux qui sont, par défaut, les bénéficiaires effectifs

Que se passe-t-il si aucun bénéficiaire effectif n’est identifié par la détention des parts ou des droits de vote au sein d’une société ?
Si les associés ne disposent pas non plus d’autres moyens de contrôle sur les gérants ou sur l’assemblée générale des associés (par exemple, un pacte d’associés), alors, les bénéficiaires effectifs sont le ou les gérants de la société.

Un exemple 

 

Monsieur Alexis et Madame Marie sont les bénéficiaires effectifs de la SARL Société Soleil.

Pourquoi ?

Aucun des associés de cette société ne détient plus de 25 % des parts sociales ou des droits de vote.

Étant donné qu’aucun bénéficiaire effectif n’a pu être identifié par la détention des parts ou des droits de vote (puisque le droit de vote multiple est interdit dans les SARL) et à condition que les associés ne disposent d’aucun autre moyen pour exercer un contrôle sur les gérants ou l’assemblée générale (comme un pacte d’associés), les bénéficiaires effectifs par défaut sont les deux gérants, Madame Marie et Monsieur Alexis. 

Quand modifier le registre des bénéficiaires effectifs ?

La mise à jour du registre des bénéficiaires effectifs (RBE) est une obligation légale. Le représentant de l’entreprise est tenu de l’effectuer lorsque des événements surviennent et rendent obsolètes les informations déclarées.

La mise à jour du registre des bénéficiaires effectifs est nécessaire en cas de :

Changement ayant un impact sur l’entreprise

Changement de situation personnelle d’un des bénéficiaires effectifs

Modification de la répartition du capital social et/ou des droits de vote

 Le transfert du siège social hors ressort
 

La modification de l’adresse du domicile

Le changement de nom d’usage suite à un mariage ou un divorce

L’augmentation ou la réduction du capital social

La cession de parts sociales ou d’actions en usufruit ou en pleine propriété

Le transfert de parts sociales suite à un décès

Le changement de structuration de l’entité au travers de laquelle le bénéficiaire effectif détient le contrôle de la société

L’entrée de nouveaux associés :  Si cela affecte le pourcentage de détention du capital des bénéficiaires effectifs actuels et/ou si les nouveaux associés ont eux aussi la qualité de BE

 

Le rejet de la déclaration : les cas fréquents

La déclaration des bénéficiaires effectifs (DBE) doit être réalisée avec attention. Avant de soumettre ce document, il est important de s’assurer que les informations sont exactes et cohérentes, et que le dossier est complet. Voici quelques cas pour lesquels le greffe peut rejeter le dossier :

Des informations contradictoires

Lorsque les informations relatives aux bénéficiaires effectifs dans le document déclaratif ne correspondent pas aux informations présentes dans les statuts de la société, le dossier est rejeté. Cela peut arriver si les statuts n’ont pas été mis à jour.

Des erreurs dans la date à laquelle un associé est devenu bénéficiaire effectif peuvent également entraîner un rejet du dépôt du document.

Il est important de veiller à ce que les informations sur les bénéficiaires effectifs soient identiques à celles figurant sur les statuts et correctes pour éviter tout rejet.

Un changement d’adresse non officialisé

L’adresse personnelle d’un mandataire social ou d’un associé de SCI est indiquée sur l’extrait kbis d’une société. En cas de déménagement, la nouvelle adresse doit être enregistrée.

Si l’adresse personnelle indiquée au moment de la déclaration diffère de celle mentionnée sur le kbis, le dépôt du document relatif aux bénéficiaires effectifs sera refusé.

Il est donc important de mettre à jour les adresses dès qu’elles changent, afin de garantir la conformité des informations fournies et d’éviter tout rejet lors des dépôts.

Des informations manquantes

L’absence de certaines informations est une cause fréquente de rejet des dépôts de déclarations de bénéficiaires effectifs.

Par exemple, en cas d’oubli du pourcentage de capital détenu ou de la date à laquelle une personne est devenue bénéficiaire effectif, le dossier est rejeté.
Des informations manquantes, telles que les coordonnées des bénéficiaires, peuvent également entraîner des refus.

Il est indispensable de vérifier l’exhaustivité et l’exactitude des données fournies avant de soumettre le dossier.

 

Les risques en cas d’absence ou de fausse déclaration

Si les bénéficiaires effectifs ne sont pas déclarés ou si les informations déclarées sont incorrectes ou incomplètes, le président du tribunal de commerce peut contraindre la société à rectifier la situation en imposant des astreintes. Cela signifie que des pénalités financières sont imposées pour chaque jour écoulé entre la demande de régularisation et sa réalisation.

En cas de non-respect de cette obligation de régularisation, la personne responsable de la déclaration des bénéficiaires effectifs encourt une amende de 7 500 € et jusqu’à 6 mois d’emprisonnement. De plus, elle risque une interdiction de gérer pouvant aller jusqu’à 15 ans, ainsi qu’une privation partielle de ses droits civils et civiques.

A noter : Le bénéficiaire effectif qui refuse de fournir les informations requises pour la déclaration encourt également une interdiction de gérer et une privation partielle de ses droits civils et civiques.

La société désignée responsable de cette déclaration est sujette à une amende pouvant atteindre 37 500 , ainsi qu’à diverses peines telles que :
– la dissolution de la société ;
– la mise sous surveillance judiciaire pendant un maximum de 5 ans ;
– la fermeture définitive ou temporaire (jusqu’à 5 ans) de l’un, de plusieurs ou de tous ses établissements ;
– l’exclusion des marchés publics définitivement ou pour une durée maximale de 5 ans ;
– une interdiction définitive ou temporaire (jusqu’à 5 ans) de faire une offre au public de titres financiers ou de s’introduire en bourse ;
– une interdiction temporaire (jusqu’à 5 ans) d’émettre des ch
èques ou d’utiliser des cartes de paiement ;
– la publication de la décision dans la presse é
crite.

 

Déterminer les bénéficiaires effectifs d’une entreprise et les déclarer est une étape essentielle pour assurer sa conformité et renforcer sa transparence financière.


Pour mener à bien cette démarche, il est important de s’entourer de professionnels aguerris. Forte de son expérience, l’équipe
LegalVision vous accompagne dans la déclaration des bénéficiaires effectifs et dans toutes vos démarches juridiques.

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